1948-1954 JAGUAR XK 120 & C TYPE.

Le Gouvernement britannique cherche à doper les exportations après la 2e guerre mondiale malgré un outil industriel dévasté et nécessitant une réadaptation à la production civile. Lord Clément Attlee, alors ministre des finances, promet une aide pour la fourniture de matières premières qui n’est consentie qu’aux industriels s’engageant à exporter plus de 50% de leur production.
William Lyons, fondateur de Jaguar (ex Swallow, ex SS) présente un projet uniquement sur le papier d’une berline rapide et luxueuse et d’une voiture de sport avec engagement d’exporter 80% de la production et obtient un accord de fournitures de Sir George Turner, représentant du ministère de l’industrie pour les fournitures de matières premières.
La berline est prioritaire et doit être présentée au salon de Londres (G-B), à Earls Court, en octobre 1948. Les panneaux de carrosserie sont fabriqués par Pressed Steel C° qui assure 60% de la production britannique. Pressed Steel se révèle incapable d’assurer la production ce qui entraîne un retard dans la présentation de la berline.
L’équipe Jaguar met en chantier deux projets dans l’urgence :
Mark V, équipée du moteur de la SS 3,5 litres d’avant guerre.
Voiture de sport équipée du nouveau moteur double arbre :
Pour ce dernier projet les études débutent pendant la guerre : Project X décliné en 11 versions pas toutes réalisées avec des architectures différentes : 4 et 6 cylindres, distribution par arbre à cames en tête ou latéral, cylindrée variant de 1300, 1700, 2000 et 3400 cm3. L’étude est portée par une petite équipe constituée par William Lyons : William Heynes (ingénieur en chef responsable de la conception), Wally Hassan (responsable du développement, ex-Bentley), Claude Baily (dessin mécanique, ex-Anzani qui a dessiné le moteur des Squire), Harry Weslake (ingénieur indépendant spécialiste des culasses) et Harry Mundy (motoriste indépendant).
Les études reprennent le X (Experimental) plus la lettre de l’ordre des études.
XF : 4 cylindres avec distribution à 2 arbres à cames en tête et soupapes commandées par culbuteurs.
XJ : 4 cylindres 2 litres (80,5×98) avec culasse préfigurant celle du XK : 2 arbres à cames en tête entraînés par chaîne, chambres de combustion hémisphériques dessinées par Heynes et soupapes inclinées pour avoir un rapport volumétrique élevé. 146 chevaux à 6000 tours.
Le moteur XJ4 est construit et testé dans la MG profilée du colonel Gardner, atteignant la vitesse de 176 km/h. On en extrapole une version 6 cylindres de 3,2 litres (83×98), abandonné car manquant de souplesse.
XK : reprend l’étude XJ à 6 cylindres avec une course allongée à 106 mm pour obtenir 3442 cm3, version définitive. 2 moteurs sont retenus : 6 cylindres en ligne « XK », 3,5 litres (3442 cm3) et 4 cylindres 2 litres (1998 cm3 -80,5×98-). Culasse en alliage léger et distribution par double arbre à cames en tête, le 4 cylindres ne sera jamais commercialisé.
William Lyons est avisé par la firme Standard qu’elle ne construira plus de moteurs et qu’elle cherche à vendre ses outillages. Il rachète le matériel et est en mesure de fabriquer ses propres moteurs. Lyons privilégie la simplicité d’usinage et de montage, la robustesse et une puissance élevée.
William Lyons dessine un roadster sport qui est présenté au salon de Londres (G-B) à Earl’s Court le 27 Octobre 1948. Appellation XK 120 : XK, pour le moteur et 120 pour 120 miles à l’heure, vitesse annoncée pour la voiture. Prix GB£ 998. Le nouveau modèle remporte un succès considérable se concrétisant par un afflux de commandes, ce qui pose un problème de fabrication en série. Seules 3 voitures sont fabriquées entre octobre et décembre 1948 et 70 en 1949. Ces voitures présentent des différences par rapport à la série (1ère : montants de pare-brise plus rectilignes avec un autre mode de fixation, ouverture de coffre par bouton poussoir, découpe ronde dans le coffre pour l’accès au logement de la roue de secours, support d’ailes avant avec percements ovales (ronds sur la série).
La XK 120 fait le tour des salons (Paris en 1949) en Europe et aux Etats-Unis avec le même succès.
La 2e voiture produite : HKV 500, spécialement préparée réussit 132 mph (211,46 km/h) sur le kilomètre lancé sur l’autoroute belge de Jabekke en mai 1949 et Lyons remporte son pari en exportant 90% de la production.

Moteur :
6 cylindres en ligne, bloc en fonte et culasse en alliage léger (poids 23 kg).
Vilebrequin sur 7 paliers de 70 mm de diamètre en acier forgé. 7 paliers renforcent la rigidité de l’ensemble et améliorent la lubrification des manetons qui disposent d’une alimentation propre en lubrifiant. Etanchéité du palier arrière par 2 demi-coquilles en aluminium encerclant un joint en amiante. Bielles en alliage léger avec conduits d’huile pour les axes de pistons.
Refroidissement liquide par pompe et thermostat.
Distribution par 2 arbres à cames en tête entraînées par chaîne duplex à 2 étages, montage mécanique permettant de déposer les arbres pour régler les soupapes sans modifier le calage initial. Sièges de soupapes en fonte-nickel et guides de soupapes rapportés à chaud, soupapes en V à 70° sur 2 rangs, bougie au centre de la chambre de combustion hémisphérique. Ce moteur est initialement prévu pour équiper une grande routière avec un calage de distribution identique pour l’admission et l’échappement (moteur en bascule), croisement entre ouverture-admission et fermeture-échappement faible.
Alimentation par 2 carburateurs SU H6 horizontaux et pompe à essence électrique.
Système électrique 12 Volts avec positif à la masse.
3442 cm3 (83×106), taux de compression : 7,0 :1 (8,0 :1 en option).
160 chevaux à 5200 tours, 29 Mkg à 2500 tours

Transmission :
Boîte de vitesses Moss à pignons à taille droite, 4 rapports avec 1ère non synchronisée.
Rapports de boîte : I. : 12,30 :1 ; II. 7,23 :1 ; III. : 4,98 :1 ; IV. : 3,64 :1. Rapport de pont : 3,64 :1 (3,27 :1 sur demande).
Embrayage mono-disque à sec Borg & Beck.
Arbre de transmission Hardy Spicer.

Châssis :
Cadre à longerons entretoisés, élaboré à partir de la MK V raccourci de 46 cm, (longueur 2,60m) et rétréci de 13 cm. Croisillon transversal en place du croisillon central.


Suspensions avant à roues indépendantes, triangles superposés et barres de torsion reprises de l’étude de la berline avec tarages revus et barre antiroulis, amortisseurs hydrauliques télescopiques.
Suspension arrière par essieu rigide, pont ENV relié à l’ossature par des amortisseurs hydrauliques à bras, ressorts semi-elliptiques à lames.
Carrosserie avec ossature en bois de frêne recouverte de panneaux d’aluminium, tablier avant, joues d’ailes et intérieur du coffre en acier pour augmenter la rigidité. Dessin par William Lyons, inspiré de la BMW 328, avec galbes arrondis. Carrosserie finalisée en 6 semaines dont 2 pour les accessoires. Le roadster roule 2 semaines avant le Salon, et les essais sont concluants.

Freins :
Tambours de 12 pouces de diamètre à commande hydraulique Girling,
Jantes en tôle 6.00×16 pouces repris de la Mk V.

Direction :
A recirculation de billes Burman-Douglas. Diamètre de braquage 9,50 m.

Evolution :

03/1950 : Nouvelle méthode de fabrication avec carrosserie en tôle d’acier emboutie, capots et portes en aluminium. Panneaux fabriqués par Pressed Steel.


03/1951 : Présentation du coupé « Fixed head Coupé » au Salon de Genève (CH), plus confortable avec vitres latérales descendantes, moquettes, intérieur cuir et chauffage, tableau de bord en ronce de noyer en place du simili. Voiture plus lourde. Ligne de toit inspirée de la SS100 coupé jamais produite et de la Bugatti Atalante.


Présentation de la version XK 120 M (Special Equipment) avec moteur revu par Harry Weslake, caractéristiques proches de celles de la Type C : arbres à cames plus pointus, soupapes plus grosses, pistons haute compression, volant moteur allégé, culasse retravaillée avec conduits pour 2 carburateurs SU H8, échappements doubles libérés. 180 chevaux à 5300 tours, 30,2 Mkg à 2500 tours avec taux de compression 8 :1 et 190 chevaux avec taux de compression 9 :1.


04/1953 : Présentation du cabriolet « Drophead Coupé » avec capote doublée, vitres latérales coulissantes avec déflecteurs, montants de pare-brise intégrés à la carrosserie, portes sans échancrures, finition identique à celle du coupé.
10/1954 : Arrêt de fabrication de la XK 120, remplacée par la XK 140.
Présentation d’un modèle spécial XK 120 « Supersonic » au Salon de Paris, carrosserie spéciale en aluminium et moteur préparé par Virgilio Conrero, alimentation par 3 carburateurs Weber double corps.

Participation à la compétition :

A partir de 1949, mais engagement réel à partir du printemps 1950, Lyons donne le feu vert en mars pour l’élaboration de versions course. Une première série de 6 voitures adaptées à la compétition est fabriquée pour Biondetti, L.G. Johnson, L.H. Haines, P. Walker, T. Wisdom et I. Appleyard (mari de Patricia Lyons, fille de William).

1950 : Silverstone : L. Johnson, 1er Gl (1ère victoire de la XK120).
Targa Florio : Biondetti, Ab. (bielle).
1000 Miles, 5 voitures : Johnson-Lea ; 5e Gl, Biondetti-Bronzoni, 8e Gl ; Cabordi, 16e Gl ; Haines-Haller, Ab. ; Wisdom-Hume, Ab.
Dundrod, Tourist Trophy : Moss, 1er Gl.
Coupe des Alpes : Appleyard, 1er Gl (NUB 120).
L’expérience acquise pendant les 1000 miles sert à préparer les voitures engagées aux 24 Heures du Mans : disparition des pare-chocs, saute-vent en place du pare-brise, 2 phares d’appoint, double sangle de capot, réservoir d’essence de 110 litres. Embrayage renforcé, ailettes de ventilation sur les tambours de freins, gros amortisseurs Newton, éclairage et étanchéité des réservoirs et canalisations améliorés. Poids moyen 1250kg, 180 chevaux à 5750 tours.
24 Heures du Mans : 3 voitures engagées avec le soutien de l’usine : Johnson-Hadley (#660040, blanche, N°17, Ab., embrayage), Haines-P. Clark (#660041, vert anglais, N°15, 12e Gl), Walker-Whitehead (#660042, vert anglais, imm. JWK 977, N°16, 15e Gl.). Décision est alors prise de construire des voitures sur la base de la XK120 capable de remporter les 24 heures du Mans.
1951 : Présentation de la XK 120 C : la voiture conserve moteur, boîte, pont et suspension avant de la XK120. Le châssis tubulaire est rigidifié par les cloisons de l’habitacle et la suspension arrière reçoit une barre de torsion alors qu’un triangle placé en pointe est monté à l’avant pour absorber le couple des accélérations et décélération. Direction à crémaillère, feins à tambours à réglages automatiques, roues fil à fixation centrale.
Moteur retravaillé par Harry Weslake : grandes soupapes, nouveaux arbres à cames, volant moteur allégé : 200/210 chevaux à 5750 tour et 30 Mkg à 3000.


Carrosserie en aluminium plus courte avec une seule portière à droite dessinée par Malcolm Sayer (ex-Bristol), 1230 kg. Nouveaux sièges baquets, volant réglable, saute-vent, place passager recouverte d’un tendelet. Voiture construite en petite série à partir de 1952 (54 exemplaires).

24 Heures du Mans : 3 voitures usine engagées, amenées par la route : Walker-Whitehead, N°20 (#003), 1er Gl ; Moss-Fairman, N°22, Ab. Bielle, (#002) ; Biondetti-Fairman, N°23, Ab. Pression d’huile (#001) ; XK120 privée N°16, Waller-Lawrie, 11e Gl.
1952 : Nouvelle carrosserie (M. Sayer) à queue longue et avant plongeant (problèmes de surchauffe mécanique).
Moteurs avec gros carburateurs SU, 200 chevaux.
24 Heures du Mans : 3 voitures usine avec petits radiateurs remplacés par les radiateurs d’origine XK 120 : Rolt-Hamilton, N°18, Ab.Surchauffe ; Moss-Walker, N°17, Ab. Surchauffe ; Whitehead-I. Stewart, Ab. Surchauffe (voiture avec petit radiateur).
Reims : 3 voitures : Moss, 1er Gl, (#005, carrosserie traditionnelle, voiture privée de Wisdom révisée à l’usine et équipée de freins à disques Dunlop) ; Douglas, 3e Gl (engagement Ecurie Ecosse).
08/1952 : 3 records mondiaux sur un coupé spécialement préparé et appartenant à William Heynes : pilotes Leslie Johnson, Jack Fairman, Bert Hadley et Stirling Moss.
1953 : Châssis avec tube de plus petit diamètre, barre Panhard à l’arrière, nouvelles biellettes de guidage.
Moteur avec 3 carburateurs Weber double corps, 220 chevaux. Carrosserie style 1951 affinée, réservoirs souples, – de 1000 kg. Freins à disques.
24 Heures du Mans : 3 voitures usine, 1 voiture engagée par l’Ecurie Francorchamps (#XKC 047, jaune, caisse non allégée sans freins à disques, N°30, 1 voiture client N°20 : Rolt-Hamilton, N°18, 1er Gl (#XKC 051) ; Moss-Walker, N°17, 2e Gl (#XKC 053) ; Whitehead-I. Stewart, N°19 4e Gl (#XKC 052) ; De Tornaco-Laurent, N°20, 9e Gl.
12 Heures de Reims : 1 voiture usine : Moss-Withehead, N°4, (#012), 1 voiture Ecurie Ecosse : Scott Douglas-Sanderson (#046), 1 voiture privée : Roboly-Simone (# 025 ou 027) : Moss-Whitehead, 1er Gl ; Scott Douglas-Sanderson, 4e Gl.
1954 : Engagements privés, l’usine alignant les types D.
24 Heures du Mans : 1 voiture engagée par l’Ecurie Francorchamps, la voiture (#047) est accidentée lors de son transport routier, amenée à l’usine ou son moteur et ses freins à disques sont transférés sur le # 012 (ex mulet usine), voiture non repeinte en jaune, mais reçoit une bande longitudinale jaune : Laurent-Swaters, N°16, 4e Gl.
12 Heures de Reims : Voiture de l’Ecurie Francorchamps réparée, 1 voiture privée (#XKC 037) : Laurent-Swaters, N°9, 3e Gl, Manussis-Dunham, N°4, Ab. Acc. (XK D 1er et 2e Gl).